Francis Cabrel : « Mon album, c'est juste des chansons »

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    Francis Cabrel : « Mon album, c'est juste des chansons » DDM
Publié le , mis à jour
Recueilli par Bernard Lescure

I l a 54 ans, trois enfants - Aurélie, Manon, et Thiu, 21, 17 et 3 ans. Toujours « assis sur le rebord du monde », Francis Cabrel sort le 31 mars son nouvel album, « Des roses et des orties », le douzième en 30 ans de carrière. Rencontre chez lui, à Astaffort, dans le séchoir à céréales d'abord devenu salle des fêtes familiale et aujourd'hui transformé en un confortable et chaleureux studio d'enregistrement.

LA DÉPêCHE DU DIMANCHE : Vous aviez la réputation de faire un album tous les 5 ans. Celui-ci sort avec un an d'avance ! L'inspiration vient plus vite ?

Francis CABREL : Oui, mais en fait je n'avais pas quitté le fil de l'écriture depuis l'album « Les beaux dégâts ». Plutôt que de tout arrêter, prendre le temps de vivre, de chanter, de voyager et de me remettre ensuite en mode écriture, j'ai écrit celui-ci comme s'il ne faisait qu'un avec le précédent.

DDD : On dit de cet album qu'il est « politique »…

F.C. : Oui, j'ai lu « colère », j'ai lu « politique », mais je ne comprends pas pourquoi. Ce n'est ni l'un ni l'autre ! C'est juste des chansons. Avec des thèmes qui ne sont peut-être pas très souvent abordés par les autres en général. Mais il n'y a pas de polémique ni de propos tenus par quelqu'un qui serait hors de lui. C'est juste une observation de la société. Alors effectivement, ça pose des questions. Et ça peut mener à des extrapolations politiques. Mais bon, moi je décris des trucs que tout le monde voit, que tout le monde entend. Je ne fais que lancer des pierres dans le jardin de chacun qui les saisit et parfois se les approprie.

DDD : Ces « pierres » sont autant de thèmes que vous déclinez souvent…

F.C. : Je continue de m'interroger sur la marche du monde. Il y a toujours le racisme, la fraternité, l'intolérance, le manque d'intelligence collective, mon interrogation religieuse (« Le Chêne-liège ») que j'avais déjà évoquée dans des chansons comme « Assis sur le rebord du monde ». DDD : Il y a des chansons que vous avez éliminées ?

F.C. : Il y en a deux, et notamment un petit blues un peu classique parlant de choses que personne n'a comprises : je voulais décrire mes funérailles de façon rigolote et (rires) je n'y suis pas arrivé. Mais je n'ai pas dit mon dernier mot!

DDD : Vous parlez pour la première fois de Thiu, votre petite fille adoptive…

F.C. : C'est un message à sa mère que l'on ne connaît pas et qui nous a fait-là un cadeau formidable.

DDD : Vous avez hésité avant d'enregistrer cette chanson ?

F.C. : Oui, j'ai tellement hésité que je me suis vraiment demandé si j'allais la chanter. Or c'est celle qui a présidé à toute l'écriture de l'album puisque c'est un texte que j'avais écrit quand Thiu est arrivée, il y a 3 ans. Et puis j'ai repris le texte plusieurs fois en l'adoucissant et j'ai fini par la chanter. Tout seul d'abord, et avec beaucoup de mal quand j'ai dû le faire devant les autres.

DDD : Lorsque vous avez ramené Thiu du Vietnam, vous étiez partis dans l'intention d'offrir un petit frère à Aurélie et Manon. C'est toujours dans vos projets ?

F.C. : Moi je veux bien avoir quinze enfants adoptifs ! J'aime bien la pagaille que font les enfants dans la maison (rires).

DDD : Alors, ce petit-frère ?

F.C. : On se pose la question de temps en temps… Si ça ne tenait qu'à moi, ce serait déjà fait. Mais bon, c'est beaucoup de boulot et il y a quelques hésitations.

DDD : On connaît Cabrel-le- chanteur, mais l'homme est toujours discret. Quelles sont vos forces et vos faiblesses ?

F.C. : Je ne me trouve pas si courageux que ça, trop gourmand - les friandises, le chocolat…, manquant de diplomatie souvent.Les forces ? Je pense que l'éloignement dû à la ruralité me donne peut-être un don d'observation plus placide, plus sage.

DDD : Vous vous êtes beaucoup engagé dans le fonctionnement de votre commune. Comment la voyez-vous aujourd'hui avec le recul d'un conseiller redevenu simple citoyen ?

F.C. : Elle se porte plutôt bien. Sur le plan culturel, avec l'association Voix du Sud devenue Centre des écritures de la chanson (N.D.L.R. : elle offre régulièrement des stages à de jeunes auteurs, compositeurs et interprètes), avec la médiathèque aussi. Elle est bien organisée sur le plan sportif avec de nouvelles installations quasiment terminées. Et puis ça va continuer.

DDD : On a annoncé le retour des cours d'instruction civique à l'école. Vous avez connu ça quand vous étiez écolier. Qu'en aviez-vous retenu ?

F.C. : Il y avait tous les jours une maxime ou une phrase qu'on devait apprendre par cœur. Le respect des animaux, ne pas jeter du pain avarié, apprendre la politesse… C'est bien que l'on revienne à ces fondamentaux.

DDD : Vous êtes aussi viticulteur. Avec la fortune, on peut faire le meilleur vin du pays ?

F.C. : (Rires) Non, il faut surtout avoir de la patience ! On ne peut pas aller plus vite que la nature. Alors j'ai beau être installé comme un vrai vigneron, les vignes sont jeunes (N.D.L.R. : il en possède 9 hectares), mon frère travaille beaucoup et d'autres avec lui aussi. On fait de notre mieux avec des vignes qui ont encore besoin de 10 ou 15 ans de maturité.

DDD : Qui sont vos vrais amis ? Des gens du show-business ?

F.C. : Il y en a que j'adore, mais que je vois plus furtivement qu'assidûment (Zazie, Souchon ou Goldman que je vois vraiment très peu), sinon ce sont des gens d'ici avec qui j'ai grandi, des musiciens avec qui je jouais à 15 ans.

DDD : Quelle est votre chanson préférée ?

F.C. : « Les mots bleus » de Christophe.

DDD : Vieillir, ça vous fait peur ou c'est comme le bon vin ?

F.C. : Qu'on le veuille ou non, ça arrive. Alors peur ou pas peur ?… Là, on n'a aucun pouvoir. Alors ça me fait peur, mais raisonnablement. Ce n'est pas une angoisse de tous les jours.

DDD: Au fait, que faites-vous le dimanche ?

F.C. :En général, rien du tout ! Promenade… Une vraie journée vide ! Un peu de guitare, de la lecture… Le truc avachi, complètement détendu !


Son actualité

Au nom de son association Voix du Sud devenue Centre des Ecritures de la Chanson en partenariat avec la Fondation d'Entreprise La Poste, Francis Cabrel a décerné mardi soir à Paris deux premiers prix à Stephan Rizon et Michaela Chariau, deux jeunes talents repérés lors des 25e et 26e Rencontres d'Astaffort en 2007. Francis Cabrel entamera une nouvelle tournée en septembre avec une halte de trois semaines au Casino de Paris en décembre . Seront à ses côtés: Michel Françoise et Eric Sauviat (guitares), B. Paganotti (basse), Denis Benarrosh (batterie) et Alexandre Léotaud (accordéon).

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