ENTRETIEN. Polémique sur le Bethmale : "Il n’y a aucune fausse information dans notre documentaire", rappelle Hugo Clément
En prenant pour exemple le Bethmale et la marque "Capitoul" pour ouvrir son enquête " Fromages, où est passé notre terroir ? ", diffusée le 15 avril dernier sur France 5, le journaliste et présentateur de "Sur le Front" Hugo Clément a créé une certaine émotion, en Ariège. Pour lui, ce n’était pas la filière de ce fromage emblématique qu’il pointait mais les marques industrielles qui dévoient l’image du terroir. Interview.
Vous ouvrez votre enquête sur un Bethmale « Capitoul », fabriqué avec du lait Prim’Hosltein d’un élevage de Haute-Garonne. Le président du Parc naturel régional d’Ariège Kamel Chibli dénonce un « documentaire à charge » et une « désinformation » quant au Bethmale, fromage emblématique de l’Ariège. Que lui répondez-vous ?
Je réponds qu’il n’y a aucune fausse information dans notre documentaire. Tout est sourcé et validé. Je ne vois donc pas en quoi il nous accuse de désinformation. Nous mettons en lumière la réalité de pratiques qui trompent le consommateur. Ce n’est pas forcément agréable à entendre mais nous sommes dans notre rôle de journalistes d’investigation en révélant des choses que les gens ne savent pas. De plus, nous n’avons jamais dit que tous les fromages Bethmale n’étaient pas faits en Ariège. Nous avons pris l’exemple d’une marque précise : Capitoul. Sur son étiquette, elle met en lumière les belles vallées ariégeoises avec des vaches traditionnelles alors qu’elle fabrique son fromage avec des vaches qui, elles, ne sont, pour la plupart, pas dans la vallée de Bethmale, ni à l’origine du Bethmale. Il n’a pas du tout été question de critiquer la filière locale. On a simplement pris un exemple pour montrer que certains jouaient sur la fibre « terroir » pour vendre leurs fromages industriels.
Le risque d’amalgame avec toutes les tommes ariégeoises choque aussi les producteurs artisanaux locaux. À tort ou à raison ?
Nous nous sommes focalisés uniquement sur le Capitoul, nous ne pouvions pas être plus clairs. Je ne pense pas qu’il y ait de problème d’amalgame. Nous n’avons pas généralisé.
Vous dénoncez de fait la standardisation des produits. Mais en France, les seuls terroirs ont-ils désormais les moyens de produire pour tout le monde ?
Une bonne partie des fromages qui sont vendus en supermarché par de grands groupes industriels sont faits avec le lait des mêmes vaches, une race du nord de l’Europe, selon les mêmes méthodes de fabrication. Or la richesse de la France en fromages a fait la réputation de notre pays : un fromage pour chaque jour de l’année. Cette spécificité vient des races locales traditionnelles et de leurs pâturages qui donnent leur goût au lait. La majorité du reportage est donc consacrée à des producteurs qui essayent de bien faire les choses, qui respectent leurs bêtes, le produit et l’environnement. Mais nous pointons aussi que les nutritionnistes recommandent 40 g de fromage par jour. Or en France, on en mange le double, en moyenne. La première chose à faire serait donc de réduire la consommation de produits laitiers industriels pour se tourner vers des produits de qualité, qui parfois ne sont pas beaucoup plus chers.
Le législateur doit-il agir pour mieux protéger ces fromages-là, 70 % des AOP étant désormais aux mains des industriels ?
Bien sûr. Mais avant out, il y a le consommateur qui doit mieux se renseigner sur ce qu’il achète et soutenir les produits fermiers locaux. Par ricochet, il soutient ainsi les écosystèmes, l’environnement, parce qu’on sait qu’entre une production industrielle et une production artisanale, les impacts ne sont pas du tout les mêmes. L’objectif de ce reportage était donc de mettre en lumière ceux qui se battent contre l’uniformisation pour maintenir vivant le terroir français, richesse de notre pays.
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